Кафедра и трон. Переписка императора Александра I и профессора Г. Ф. Паррота

Андрей Андреев
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Аннотация: Профессор физики Дерптского университета Георг Фридрих Паррот (1767–1852) вошел в историю не только как ученый, но и как собеседник и друг императора Александра I. Их переписка – редкий пример доверительной дружбы между самодержавным правителем и его подданным, искренне заинтересованным в прогрессивных изменениях в стране. Александр I в ответ на безграничную преданность доверял Парроту важные государственные тайны – например, делился своим намерением даровать России конституцию или обсуждал участь обвиненного в измене Сперанского. Книга историка А. Андреева впервые вводит в научный оборот сохранившиеся тексты свыше 200 писем, переведенных на русский язык, с подробными комментариями и аннотированными указателями. Публикация писем предваряется большим историческим исследованием, посвященным отношениям Александра I и Паррота, а также полной загадок судьбе их переписки, которая позволяет по-новому взглянуть на историю России начала XIX века. Андрей Андреев – доктор исторических наук, профессор кафедры истории России XIX века – начала XX века исторического факультета МГУ имени М. В. Ломоносова.

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26. G. F. Parrot à Alexandre IER

[Dorpat], 12 décembre [1803]

Sire!

Votre Empire va consacrer à Votre souvenir la journée qui commence1. Des millions d’âmes pures, de cœurs droits vont adresser à l’Être Suprème des vœux pour âme pure, pour cœur droit que cet Être Suprème a placé sur le trône. Avant que l’aurore donne le signal du mouvement général j’entre dans ma solitude pour me joindre plus intimement à cette grande masse qui Vous chérit, pour penser à Vous, Vous aimer sans réserve, sans distraction, pour Vous dire que je Vous aime, pour Vous parler de ce sentiment profond que Vous m’avez inspiré. Alexandre! Votre cœur est sensible; il connait l’amitié; Vous lirez avec plaisir ces lignes dictées par le sentiment le plus tendre et le plus pur.

Peut-être en cet instant êtes Vous Vous-même dans le recueillement, occupé à rendre grâces à l’Être Suprême pour l’amour que Vous consacrent tant de millions de Vos semblables. Que j’aime à voir mon Alexandre, mon héros pénétré de ce sentiment sublime! Cette harmonie entre lui et son peuple doit plaire à la . Un Empire d’un côté, Alexandre de l’autre! Tous deux à ses pieds, tous deux reconnaissants. L’humanité n’a rien de si beau à lui offrir.

Que Vous êtes heureux! O! je voudrais pouvoir Vous répéter ce mot journellement, Vous le rappeler sans cesse et surtout dans les instants désagréables où Votre cœur souffre de ne pouvoir faire tout le bien qu’il se propose. La somme des maux que Vous épargnez à l’humanité est grande. L’idée de Vous être consacré tout entier à ce sublime emploi doit Vous être une source inépuisable de bonheur.

Que Vous êtes heureux! – Gardez-Vous de trouver dans ce mot une flatterie raffinée que m’avait dictée malgré moi mon tendre attachement pour Vous. Je n’ignore pas combien il Vous reste encore à faire pour prendre ce mot dans un sens absolu, Vous savez Vous-même que Vos idées les plus chères sont encore loin de l’exécution et qu’il Vous faudra encore des années de combats, de persévérance, de la constance la plus opiniâtre pour en réaliser une partie. Cependant je Vous le répète: Vous êtes heureux, heureux d’avoir conçu sur le trône ou peu avant d’y être monté, les idées sublimes. Vous êtes heureux par la volonté décidée que Vous avez de les réaliser. Vous êtes heureux, parce que Vous trouverez dans Votre caractère la fermeté nécessaire pour vaincre les obstacles qu’on Vous opposera. Vous êtes heureux par l’activité perpétuelle que Vous avez à Vos devoirs. Vous êtes heureux enfin par la reconnaissance universelle.

Que je serais heureux moi-même si j’avais l’assurance que le sentiment profond que Vous m’avez inspiré, en devenant en quelque sorte réciproque, contribue aussi à Votre bonheur! Car, être aimé sans aimer ne rend pas heureux. On ne jouit que de son propre sentiment. O Alexandre! À cet instant Votre image se présente vivement à mon cœur. Je Vous vois m’aborder pour la première fois à Pétersbourg, avec cette physionomie pleine d’intérêt qui m’inspira le désir ardent d’être aimé de Vous. – Mes yeux se mouillent. O mon Héros! Ami des hommes! Mortel si cher à l’humanité. Si mon vœu ne peut s’accomplir, si ton cœur en cherche un autre que le mien – ne crois pas que j’en serai malheureux. . Celui de tes vertus, l’amour dont tu es si digne, me restera et fera le bonheur de ma vie. Oui, il me restera puisque tu seras toujours le même, puisque tu aimeras toujours mes frères avec la même tendresse. – Mais je réitère mon ancienne prière. Quand le moment viendra – souviens-toi de moi et de ta parole. Les cendres de ta lettre me restent.

Parrot


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